Œuvres octophoniques

Composer en huit pistes (octophonie) signifie de travailler au moment de la composition dans un studio équipé de huit haut-parleurs pouvant simultanément faire entendre huit pistes (c'est-à-dire huit “sons”, ou huit voies de mixage) différentes. De même, au moment du concert, le dispositif de diffusion doit-il comporter au moins huit haut-parleurs afin de restituer l'œuvre intégralement.

Les Inventions sont la première expérience d'écriture octophonique du compositeur. (En effet, si l'ensemble La Main vide est octophonique, seule cette dernière partie a été conçue en huit pistes. Les deux premières, Bâton de pluie et La Fleur future, furent composées en quatre pistes, et augmentées en huit pour leur versions finales.) Il s'agit donc d'une césure importante dans la carrière du compositeur, puisque toutes ses créations seront désormais composées en octophonie.

Le cadre même de ce catalogue (qui implique de suivre chaque œuvre selon l'ordre chronologique) n'est pas le lieu pour rendre compte de ce que représente cette évolution dans la pensée du compositeur. Une analyse transversale et ordonnée à des “intuitions d'écoute” fondamentales s'y prêterait davantage.

Voici cependant quelques réflexions qui pourront, j'espère, accompagner l'écoute de ce corpus baylien encore en devenir.

Si l'octophonie différencie les sons et permet de les localiser dans l'espace et de les y mouvoir, ce ne sont pas ces possibilités cinétiques qui, d'abord, intéressent Bayle. L'octophonie lui permet avant tout une plus grande transparence des matériaux. Elle évite le mixage effectif au profit d'un mixage “aérien” des sons au moment de leur écoute simultanée. Ces qualités aériennes de transparence frappent d'emblée l'oreille à l'écoute de Morceaux de Ciels, de Concrescence, d'Ombrages et trouées ou d'Univers nerveux par exemple. Ainsi l'octophonie offre-t-elle un moyen pour le compositeur de fragilisation et d'aération du matériau. Cette “aération” me semble la continuation de l'usage, mainte fois évoquée ci-dessus, de sonorités estompées ou ombrées — du « sfumato baylien ». Les sons eux-mêmes se retrouvent affranchis, élargis, libérés totalement de leurs causes dynamiques et mécaniques, des tenants et aboutissants de leur production “terrestre”, au profit d'une autre causalité, invisible mais décisive : celle du flux. On peut dire que ce flux — avatar du son-vitesse-lumière — est l'interprétation baylienne de leur acousmaticité.

La notice d'Ombrage et trouées parle de se tenir “à l'intérieur du temps d'une étincelle — et de s'y installer comme sous un arbre”. C'est à cet intérieur du phénomène sonore que vise l'octophonie de Bayle. Là, un changement s'opère, comme par un déhanchement de l'écoute. Paradoxalement la dissémination spatiale qu'offre le multipiste fait ressortir une écoute centrale, comme épurée. Le son n'est plus le signe d'aucun danger. Le couple séduction-menace, souvent présent dans plusieurs œuvres antérieures, est évanoui, laissant place à une effusion et une tendresse nouvelles.

Consultation - Diffusion

Depuis 1991, date de la fondation de Magison – label de diffusion et studio de production de François Bayle – l'ensemble de l'œuvre a fait l'objet d'une révision par l'auteur pour le concert et pour la publication CD du Cycle Bayle (18 volumes parus à ce jour, cf. discographie), et du Coffret Bayle, 50 ans d’acousmatique (15 Cd. 2012-InaGrm). .

L'utilisation des versions CD (dont le profil dynamique est spécifique) est interdit pour le concert.

copies numérisées et documentées de notices, photos, émissions radiophoniques, consultables :